Par définition, un inédit est un morceau qu’on a pas pu ou pas voulu sortir, pour x raisons. Celui-ci, je pense qu’il n’était pas assez bon, mais il est possible aussi qu’on ne l’ai pas mis par manque de place sur le cd. Pour être honnête j’avais complètement oublié ce track, c’est mon ami Karim, qui s’est occupé de nous pendant des années à Sony, qui l’a rappelé à mon bon souvenir la semaine dernière. En l’écoutant, ça m’a instantanément replongé dans l’ambiance de cet album. Les conditions étaient optimales, gros studio, super ingé, piscine, gros budget, bref on était aux petits oignons.
Et puis le studio polygone c’était un peu notre deuxième maison, personnellement j’ai du y passer au moins un an. On y croisait tout le rap français, ce qui était plutôt cool. On s’y sentait bien et on bringait pas mal, directement dans le studio. On a même foutu en l’air une grosse table de mix en trinquant au dessus. On y a fait du bon boulot mais y avait un truc qui me dérangeait, on s’écoutait trop. On écoutait certains morceaux en boucle, un peu comme si on était fan de nous mêmes, je trouvais pas ça super saint. Mais bon, on était portés par la vague. Tous ceux qui entraient dans le studio quand on y faisait des écoutes, son à fond, étaient pris dans l’ambiance. Je me souviens très bien de célèbres rappeurs parisiens montant sur la table ( pas celle de mix hein) en criant ” jusqu’au bout art de rue” un verre de Jack en main.
Francis ” cissou” Delmas, le formidable manager du studio avait mis un petit studio annexe, mais de très grande qualité, à notre disposition pour y installer mon matos de prod. En ce temps là, avec loutch, on se partageait les mêmes machines. Et ça tournait quasiment h24. C’est là bas que j’ai fait ce beat, comme la majorité des beats de l’album. J’ai déjà dis dans un post précédent que j’étais dans une sorte de concurrence au niveau des instrus avec loutch mais c’est plus compliqué que ça. Pendant l’enregistrement, il y avait des moments où on était en panne d’instrus, où j’étais en panne d’instrus, et tout le processus d’enregistrement était stoppé. Bien sûr, cela créait une certaine frustration, sans parler du fait que les journées de studio étaient assez chères, et même si c’était le cadet de nos soucis, on savait qu’à la longue ça pouvait être problématique. Pour palier à cette situation, loutch s’est mis aux machines pour créer des sons sur mesure qui faciliteraient son écriture.
C’est comme ça que sont nés ” imagine”, ” dans la légende ” ou” filles flics descente ” par exemple. Il faisait le beat, écrivait son couplet dans la foulée et le morceau était amorcé. C’est donc un peu malgré lui qu’il a créé ces morceaux. On était très proches à cette époque, et je revois son attitude, quasi désolée, de faire mon job. Mais j’avais été défaillant et il était venu au secours du groupe, c’est ça la famille non ? Mais ça allait changer un équilibre à jamais, mais c’est une autre histoire.